Une histoire de l’ingénierie sociale

Vous trouverez ici quelques points de repère historiques sur l’ingénierie sociale dans le champ politique et social

Victor Considerant, philosophe et polytechnicien, 1808-1893

En 1841, Victor Considerant, philosophe et polytechnicien, qualifie d’ « ingénieurs sociaux » les membres des phalanstères, ces communautés de production et d’habitats visant une vie harmonieuse.

Frédéric Le Play

2ème moitié du XIXème siècle: les sciences sociales investissent le champ de la formation des ingénieurs des Mines, sous l’impulsion de l’ingénieur et homme politique Frédéric Le Play (1806-1882), puis de ses disciples (statistiques, études de terrain, monographies sur la vie des familles ouvrières…).

Otto Neurath

1ère moitié du XXème siècle, le philosophe, sociologue et économiste autrichien Otto Neurath propose une économie socialisée, reposant sur une administration de la production planifiée par la société grâce à la Gesellschaftstechnik, « technique de la société », traduit aussi par « ingénierie sociale ». Selon sa femme, Marie Neurath, « Nous agissons selon la connaissance que nous procure la science ; les médecins nous enseignent comment rester en bonne santé, les physiciens permettent aux ingénieurs de concevoir de nouveaux moteurs. Les découvertes de la science sociale peuvent être utilisées pour résoudre les problèmes sociaux et planifier la protection sociale. C’est cela l’ « ingénierie sociale ». »

Marie Neurath 1898-1986
Marie Neurath 1898-1986
Karl Popper

Milieu du XXème siècle, à l’encontre des grandes politiques ambitieuses et des projets de société idéologiques, l’enseignant et épistémologue autrichien Karl Popper propose des progressions ponctuelles et expérimentales. Il oppose une ingénierie sociale qu’il qualifie d’utopique – car éloignée des possibles, au service de fins déraisonnables et aux moyens inadéquates – à une ingénierie sociale dite ponctuelle, fragmentaire, au service de fins réalisables, de politiques réformistes et mobilisant des moyens en adéquation avec les objectifs poursuivis.

couverture du livre L'ingénierie sociale

En 1977, Vincent de Gaulejac, Jean Fraisse et Michel Bonetti créent l’association Germinal, dont les objectifs sont d’analyser les pratiques des professionnels de la relation (travailleurs sociaux, enseignants, thérapeutes) et des militants de l’action politique et sociale ; d’élaborer un cadre théorique mettant en relation les dimensions économiques, politiques, idéologiques et psychologiques qui structurent les rapports sociaux ; et d’expérimenter de nouvelles pratiques d’intervention, de recherche et de formation dans une perspective autogestionnaire. Ils produiront alors une série d’études qui les conduiront ensuite à vouloir présenter leurs méthodes d’intervention dans des écrits, dont l’ouvrage L’ingénierie sociale aux Éditions Syros (réédité en 1995, aujourd’hui indisponible à la vente).

photo du diplôme d'ingénierie sociale

En 2006 est créé le Diplôme d’Etat d’Ingénierie Sociale (DEIS), au motif suivant : « Les transformations sociales, la territorialisation et la complexité croissante des dispositifs liés aux politiques sociales et à l’action sociale et médico-sociale, les exigences d’adaptation et de qualité des réponses à apporter aux besoins des usagers, la prise en compte du contexte européen impliquent pour les organisations des besoins de compétences accrus, sur des profils de cadres managers et de cadres développeurs. Le métissage des compétences existe entre ces deux profils. Ainsi, si les titulaires du diplôme d’Etat d’ingénierie sociale ancrent principalement leurs compétences dans les registres du cadre développeur, ils sont aussi compétents dans le domaine de la mobilisation des ressources humaines. » (Arrêté du 2 août 2006 relatif au diplôme d’Etat d’ingénierie sociale, annexe I)